Onze ans de flottement, une décision historique du Conseil d’État le 25 février 2025 et un décret qui doit paraître dans les prochains mois : le sujet de la formation des collaborateurs immobiliers n’a jamais été aussi brûlant. Si vous dirigez une agence, si vous êtes vous-même collaborateur habilité à négocier, s’entremettre ou vous engager pour le compte d’un titulaire de carte, ou si vous envisagez d’entrer dans le métier, c’est maintenant qu’il faut sécuriser vos habilitations et anticiper le futur cadre légal. Dans cet article, nous reprenons l’intégralité des informations déjà publiées (FNAIM, Conseil d’État, presse spécialisée) et nous les mettons en perspective pour vous offrir la ressource la plus exhaustive disponible à ce jour sur la requête « formation collaborateurs immobiliers ».
Fin du vide juridique : ce que change la décision du Conseil d’État du 25 février 2025
Le Conseil d’État a intimé l’ordre au Premier ministre de publier, sous six mois, le décret d’application de l’article 4 de la loi Hoguet (loi n° 70-9 du 2 janvier 1970), dans sa rédaction issue de l’article 24 de la loi ALUR, fixant les compétences professionnelles initiales des collaborateurs d’agents immobiliers.
En 2014, la loi ALUR avait prévu que toute personne habilitée par un agent immobilier justifie d’une compétence professionnelle ; mais faute de décret, cette obligation était inapplicable. Suite à une demande administrative restée sans réponse en novembre 2023, la FNAIM a saisi le Conseil d’État en mars 2024 et a obtenu gain de cause : le 25 février 2025 (décision n° 492640), la plus haute juridiction administrative a jugé que l’attente de plus de dix ans excédait le « délai raisonnable » et a enjoint le gouvernement d’agir. Loïc Cantin, président de la FNAIM, a qualifié cette décision de « victoire essentielle pour la profession et pour la qualité du service rendu aux clients ». Concrètement, nous entrons dans une période transitoire : six mois pour clarifier le contenu, la durée et les modalités de la formation initiale.
Quelle est la formation obligatoire pour un agent immobilier et pour ses collaborateurs ?
Aujourd’hui, le titulaire de la carte professionnelle doit suivre 42 heures de formation continue tous les trois ans conformément au décret n° 2016-173 du 18 février 2016. Concernant les collaborateurs, le futur décret devrait imposer une formation initiale. La FNAIM propose, dans ses recommandations, 42 heures de formation initiale (28 heures en présentiel + 14 heures en distanciel) ou 18 mois d’expérience professionnelle dans un poste similaire — ces modalités restent toutefois des propositions syndicales en attente de confirmation officielle.
La distinction est essentielle. La formation continue de 42 heures sur trois ans, dont deux heures obligatoires dédiées à la déontologie et deux heures à la non-discrimination, s’applique depuis le 1er avril 2016 à tous les professionnels titulaires de la carte (transaction, gestion, syndic) et à leurs collaborateurs déjà habilités. La nouveauté à venir porte sur l’accès au métier : toute personne demandant l’habilitation après l’entrée en vigueur du décret devra prouver, avant même de commencer, les conditions de compétence initiale qui seront définies par le texte réglementaire. Les collaborateurs déjà détenteurs d’une attestation avant la date d’application seront réputés satisfaire l’exigence initiale.
Formation initiale des collaborateurs : ce que propose la FNAIM
La FNAIM plaide pour un socle de 42 heures ou 18 mois d’expérience, avec reconnaissance automatique des habilitations existantes. Le contrôle futur relèverait de la commission de contrôle instituée au sein du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières (CNTGI), opérationnelle depuis le décret n° 2019-298 du 10 avril 2019.
La fédération professionnelle propose un format en deux blocs : 28 heures en présentiel pour les fondamentaux (cadre juridique, éthique, prospection et techniques de négociation) et 14 heures en distanciel pour consolider les acquis. Serait également admise une expérience de terrain d’au moins 18 mois dans une fonction comparable (transaction, location, gestion, syndic). Ces modalités constituent des recommandations sectorielles ; le contenu définitif du décret n’est pas encore connu.
Important : Les collaborateurs habilités avant la parution du décret seront automatiquement considérés comme remplissant l’exigence de compétence initiale.
Tableau récapitulatif
| Public concerné | Obligation de formation initiale | Obligation de formation continue (tous les 3 ans) | Particularités |
|---|---|---|---|
| Titulaire de la carte professionnelle (transaction, gestion, syndic) | Non concerné par le futur décret | 42 h dont 2 h de déontologie + 2 h non-discrimination | En vigueur depuis le 1er avril 2016 |
| Collaborateur habilité AVANT l’entrée en vigueur du décret | Dispense (compétence réputée acquise) | 42 h dont 2 h de déontologie + 2 h non-discrimination | Attestation existante vaut validation |
| Nouveau collaborateur demandant une habilitation APRÈS le décret | Selon modalités du futur décret (propositions FNAIM : 18 mois d’expérience OU 42 h) | 42 h dont 2 h de déontologie + 2 h non-discrimination | Contrôle par commission CNTGI |
Obligation de formation sur la déontologie : rappel des deux heures incontournables
Depuis le 1er avril 2016, tous les professionnels de l’immobilier (titulaires de carte, salariés habilités, agents commerciaux) doivent consacrer au minimum deux heures de leur cycle triennal à la déontologie, sous peine de refus de renouvellement de la carte ou de l’attestation.
Le décret n° 2016-173 du 18 février 2016, complété par le décret n° 2020-1259 du 14 octobre 2020, précise que ces deux heures peuvent être intégrées dans n’importe quel module de formation, à condition que le programme couvre le Code de déontologie (obligations d’information, impartialité, lutte contre le blanchiment, etc.). Le décret de 2020 a ajouté deux heures obligatoires sur la non-discrimination. Un organisme de formation enregistré conformément aux articles L. 6351-1 A à L. 6351-8 du Code du travail peut délivrer cette formation. L’obligation s’applique également aux agents commerciaux, souvent oubliés par les agences.
Quelle formation est la meilleure pour l’immobilier ?
La « meilleure » formation est celle qui colle à votre projet : transaction, gestion locative, syndic, commerce ou immobilier d’entreprise. Au niveau universitaire, les spécialisations les plus demandées sont le marketing, la finance, la comptabilité, la psychologie appliquée et le commerce.
Les parcours se sont diversifiés : BTS PI, licence professionnelle Métiers de l’immobilier, master droit immobilier, mais aussi écoles de commerce avec majeure « Real Estate ». Dans le cadre du futur décret, la formation initiale proposée par la FNAIM vise la professionnalisation rapide : droit de la transaction, urbanisme, fiscalité, estimation, techniques de vente, numérique. Pour les profils plus académiques, les universités renforcent leur offre : master Gestion de patrimoine, MSc Real Estate Finance ou encore MBA Management immobilier. L’important reste la cohérence entre le contenu suivi et l’activité exercée ; les organismes contrôleurs (CCI, DGCCRF, commission de contrôle du CNTGI) y seront attentifs.
Salaire moyen d’un agent immobilier : que vise-t-on après la formation ?
Selon les données sectorielles (non officielles), un débutant perçoit en général entre 1 500 € et 2 000 € brut mensuels, auxquels s’ajoutent des commissions pouvant représenter 4 % à 11 % du montant des honoraires d’agence. Les revenus varient selon le statut (salarié, agent commercial) et la conjoncture.
Le salaire fixe est souvent complété par un pourcentage sur les honoraires d’agence, ce qui peut porter la rémunération annuelle d’un bon négociateur au-delà de 40 000 € bruts selon les estimations professionnelles. Pour un gestionnaire locatif ou un syndic, la part variable est moindre mais le revenu est plus stable. Là encore, la formation joue un rôle clé : maîtriser les aspects juridiques et fiscaux d’une vente complexe, ou savoir optimiser la rentabilité d’un portefeuille de gestion, accroît la valeur perçue par l’employeur et dynamise la rémunération.
Devenir collaborateur ou agent immobilier sans diplôme : est-ce encore possible ?
Oui, à condition de faire valider son expérience auprès de la CCI. Selon les conditions d’obtention de la carte professionnelle :
- Avec un bac (ou diplôme équivalent en droit, économie ou commerce) : 3 ans d’expérience salariée à temps plein auprès d’un titulaire de carte suffisent pour demander la carte T.
- Sans bac : 10 ans d’expérience salariée à temps plein sont requis (ramenés à 4 ans pour les cadres).
La Validation des acquis de l’expérience (VAE) permet également d’obtenir un diplôme reconnu. La parution du décret ALUR renforcera néanmoins la dimension formation : même sans diplôme, il faudra prouver les conditions de compétence initiale définies par le texte. Les réseaux mandataires devront accompagner leurs nouveaux entrants, sous peine de les voir refoulés par la CCI.
Ce que les agences doivent faire dès maintenant
Vérifiez les habilitations existantes, anticipez les coûts de formation et préparez un plan de montée en compétences avant la publication du décret.
L’avocate Caroline Dubuis-Taleyrach l’a rappelé : exercer sans habilitation est interdit, mais cela arrive, par exemple en cas de rachat de cabinet, de période d’essai prolongée ou de retard administratif. Or, le décret va créer une ligne de partage : tous les collaborateurs sans attestation le jour J devront remplir l’exigence de compétence initiale, donc financer (ou faire financer) la formation requise. Le bon réflexe consiste à :
- Dresser l’inventaire des habilitations de votre équipe via la CCI
- Régulariser les situations irrégulières avant la parution du décret
- Sélectionner des organismes de formation enregistrés capables de délivrer un programme conforme aux exigences réglementaires
- Budgéter la formation continue triennale pour tous (42 heures) afin d’éviter les refus de renouvellement de carte ou d’attestation
La DGCCRF et les CCI disposent d’un pouvoir de contrôle et de sanction : amendes administratives pouvant atteindre 15 000 € pour les personnes physiques et 75 000 € pour les personnes morales, restitution d’honoraires perçus irrégulièrement, voire poursuites pénales en cas d’exercice illégal.
Passer à l’action avant que le décret ne tombe
Nous voici à l’orée d’un changement attendu depuis 2014. Le vide juridique est sur le point d’être comblé, et l’effet sera immédiat : seules les agences ayant anticipé le nouveau cadre conserveront leur agilité commerciale. Profitez des quelques mois qui restent pour vérifier vos habilitations, programmer la formation initiale pour vos recrues selon les modalités qui seront définies par le décret, et consolider le plan triennal de 42 heures pour l’ensemble de l’équipe. Ainsi, vous transformerez une contrainte réglementaire en avantage concurrentiel durable.
Note : Les informations contenues dans cet article sont à jour au 27 novembre 2025. Les modalités de formation initiale (42h ou 18 mois d’expérience) mentionnées correspondent aux propositions de la FNAIM ; le contenu définitif du décret n’est pas encore publié. Il est recommandé de vérifier les conditions actuelles auprès des organismes compétents (CCI, DGCCRF) avant toute décision.